Histoire de la Commune de Sainte-Livrade

PAR M. DAYNES

 

Sainte-Livrade est une petite ville de 6000 habitants. On trouve la commune située dans une boucle du Lot, débordant sur les premiers contreforts du Pays de Serre. Elle est bordée à l'est par les ruisseaux de Combegarou et de Taillepied, au nord par le Lot, au sud par l'Automne.

 

1. Préhistoire
Le territoire de la commune actuel est occupé depuis la plus haute antiquité par l’homme. Les carrières gravières sur des terrasses du Lot ont livré des outils façonnés sur galets datés d'environ 450 000 ans.
On a trouvé au lieu-dit Piquessouque un biface (Outil de pierre taillé sur les deux faces).
2. Protohistoire
La découverte dans le Lot d'épées de l'époque de l'âge de bronze, montre la présence d'une occupation humaine.
Dès le premier âge du fer, l'esplanade de "Saint-Martin" est occupée par l'homme.
3. Période Gallo-Romaine
Sous l'empereur Claude le territoire est réorganisé, des chemins, routes navigables, des voies de communication sont développés.
  • 1. Les Routes*
  • La région d'Agen est extrêmement intéressante par l'existence de ses itinéraires : des voies principales antiques et secondaires. Des voies secondaires traversent la commune. Une voie est-ouest "La Tenarèze" qui joint Aiguillon à Eysses par "le Gué de Madame". Une seconde voie qui, se séparant de la voie Agen-Eysses entre "la Croix Blanche" et Saint-Antoine, se dirigeait vers Sainte-Livrade par Lamaurelle et Villamade (on devait traverser le Lot par un gué !). Elles succédaient sans doute à des itinéraires protohistoriques comme semble l'indiquer les noms des lieux dits : Le Rouge ou Côte Rouge (Rouge vient du Gallois "ruger" qui signifie "la route").*
  • 2. Le Lot*
  • La navigation sur le Lot est bien attestée au Moyen-Age. Elle a aussi été utilisée dès la période antique pour des chargements pondéreux comme le montre les tuiles et les meules remontées au cours des dragages.*
  • 3. L'Occupation du Sol*
  • A partir de Claude, de nombreux établissements furent implantés sur le territoire de la commune. De grandes villas décorées de mosaïque et de statues de marbre montrent la richesse des propriétaires de cette époque.*
  • Le Centre de la ville situé au carrefour des deux voies a été à l'origine d'un établissement : c'était probablement un vicus (une agglomération secondaire). On y trouve également des petits établissements secondaires.*
4. Le Moyen Age
On trouve en Sainte-Livrade un fragment de sarcophage en marbre des Pyrénées daté du Vème/VIème siècle qui montre que l'occupation se poursuit au haut Moyen-Age. La présence de deux nécropoles, l'une autour de l'église Saint-Martin qui a livré au siècle dernier une boucle d'oreille en or, l'autre autour de l'église paroissiale où de nombreux sarcophages ont été mis au jour, dont l'un contenait un vase apode en verre. La nécropole de l'église paroissiale s'est implanté dans les vestiges d'un bâtiment gallo-romain. Au début du XIIème siècle (1117) le monastère est occupé par un collège de chanoines qui cède tous ses biens à l'abbaye bénédictine de "La Chaise-Dieu" et se place sous sa dépendance. Cette donation est confirmée par le pape Eugène II. C'est à cette époque que doit se situer la reconstruction de l'église. Au cours du XIIIème siècle de violentes disputes opposèrent les religieux à l'évêque d'Agen, les premiers n'admettant pas de perdre leur autorité sur les paroisses qui dépendaient du prieuré "Saint-Livradais". Un accord sera enfin trouvé en 1242.
A la même époque ils furent en lutte avec les seigneurs du voisinage qui cherchaient à usurper leurs biens. Celle-ci se terminera à la fin de la Guerre de Cent Ans au bénéfice des Barons de Montpezat qui accaparèrent une partie de la seigneurie de Sainte-Livrade.`Avant 1271, la ville est entourée d'une première enceinte, et dotée d'une assemblée municipale "La Jurade" ainsi que de quatre consuls.
En 1289, la ville s'étend au sud avec la création d'une bastide par Jean de Grailly en pariage avec l'abbé de La Chaise-Dieu et sera entourée d'une seconde enceinte.
Au cours de la Guerre de Cent Ans, Sainte-Livrade fut le théâtre de nombreuses opérations militaires et fut prise et reprise plusieurs fois par les différents partis.
  • 1. La Seigneurie*
  • La seigneurie de Sainte-Livrade comprenait les paroisses de Sainte-Livrade et de Saint-Etienne. Au Nord, si la paroisse de Sainte-Livrade allait jusqu'au Lot, la bordure appartenait à la juridiction de Casseneuil. A l'Est une partie appelée "Fief des Limites" appartenait en indivis au Seigneur de Tombebouc et au Prieur.*
  • 2. Les Seigneurs*
  • La seigneurie, suivant les époques, était partagée entre plusieurs parçônniers : le Prieur, le Roi de France et les familles du Fossat, Noaillan Madaillan. Le plus ancien connu est Amanieu de Noaillan qui rend hommage à Simon de Montfort pour sa terre de Sainte-Livrade. A la fin de la Guerre de Cent Ans, la seigneurie appartient en indivis au prieur et au Baron de Montpezat qui s'en partagent les différents revenus (à l'exception de la justice qui appartient tout entière au Baron de Montpezat !) Elle fut englobée dans le Duché d'Aiguillon.*
  • 3. Les Châteaux*
  • Au Moyen-Age plusieurs châteaux ont été construits sur la commune :*
  • La tour Madaillan s'élevait à côté de l'église Saint-Martin et surveillait le Lot. Quelques vestiges s'élevaient encore au début du XVIIIème siècle.*
  • Mazières construit en bordure du ruisseau du Merdassou qui alimentait ses fossés en eau. Il appartient à la famille du Rocal puis aux Jacobet.*
  • La tour del Garn : les restes de cette tour qui avait été transformés en clocher de la chapelle des Pénitents s'écroulèrent à la fin du siècle dernier. Elle tenait son nom de la famille d'El Garn dont un membre avait épousé une nièce de Bertrand de Got qui devint pape sous le nom de Clément V.*
  • La tour del Rey occupait l'angle nord-ouest de l'enceinte : elle est le dernier vestige de cette forteresse. Un logis était accolé à la tour sur sa face nord comme le montrent les têtes sculptées que l'on peut encore apercevoir. Il était séparé de la ville par un fossé.*
  • Pauillac, situé dans la paroisse de Sainte-Livrade en bordure du Lot, appartenait à la famille de Cours.*
  • Lamothe, sur la rive gauche du Lot : le nom du lieu-dit semble indiquer la présence d'une motte féodale.*
  • 4. Les Enceintes*
  • La ville fut entourée de deux enceintes consécutives :*
  • La Première est antérieure à 1271. Elle n'est connue que par les textes. Elle devait englober le prieuré, la "Tour del Rey" et une petite agglomération. La porte située au sud de la tour doit appartenir à cette première enceinte. La rue de la duchesse et la rue basse semblent être les restes du fossé.*
  • La seconde enceinte est postérieure à 1289. Elle s'appuyait au nord sur le rebord d'une terrasse du Lot. Sur les autres faces elle est précédée d'un fossé alimenté en eau par deux ruisseaux. Elle était percée de cinq portes : au sud, la porte d'Agen, à l'ouest la porte "Notre-Dame" au bout de la rue porte campagne qui fut percée à une époque plus tardive ainsi que la porte "Saint-Louis" à l'extrémité de la rue "Nationale", au nord, la porte du téron située à l'angle de la poste, et, à l'est, la porte brette ou de Villeneuve.*
  • 5. Le Pont*
  • Au XIIIème siècle les habitants de Sainte-Livrade obtiennent l'autorisation de construire un pont sur le Lot. Le passeur du bac s'étant plaint au Comité de Toulouse de la concurrence qui devait lui être faite, les piles furent réalisées mais le pont jamais terminé.*
5. Le XVIème siècle
Après les ravages de la Guerre franco-anglaise de Cent Ans, on assiste à la remise en état du pays. Au cours de la seconde moitié du siècle les guerres de religion vont amener de nouvelles destructions.
6. Le XVIIème siècle
Au cours de ce siècle la juridiction de Sainte-Livrade fut ravagée par de nombreux fléaux : la peste, la famine, les inondations et des calamités climatiques telles que la grêle et de grands froids. Les intempéries étaient si grandes qu'en 1630 la famine fit plus de 800 morts dans la juridiction de Sainte-Livrade qui comptait environ 4000 habitants.
En 1652 la guerre fit son retour dans la vallée du Lot avec le siège de Villeneuve par l'armée royale et les combats du port de Sainte-Livrade pour interdire l'approvisionnement des frondeurs, ce qui provoqua encore des malheurs pour la population des environs.
 
Ce siècle fut aussi celui du renouveau de la religion catholique.
 
Création d'une confrérie de Pénitents Blancs. La construction de la chapelle "Saint-Sébastien", le transfert d'une côte de Sainte-Livrade donnée par les moines de l'abbaye de "Granselve en Tarn-et-Garonne". Cette cérémonie fut l'occasion d'une immense procession de Eysses à Sainte-Livrade. C'est aussi à cette époque que fut créé le couvent des "Ursulines" et la mission de "La Rose". Les Mauristes arrivent à Sainte-Livrade à cette époque et remettent en état le prieuré.
 
Les registres paroissiaux gardent la trace de la conversion de quelques protestants.
7. Le XVIIIème siècle
Le XVIIIème siècle fut en général une période calme, uniquement troublé par des aléas climatiques et quelques faits divers comme de petites périodes de disette.
8. La Révolution
Le Prieuré, le couvent des "Ursulines" et la "Maison de la Mission de la Rose" sont confisqués et vendus comme biens nationaux.
Certains nobles émigrèrent. Marie Thérèse Filhout de Chimbaud, veuve de Jacobet de Mazières, fut décapitée à Bordeaux le 22 janvier 1794, parce que son fils avait émigré.
9. Le XIXème siècle
Le 8 août 1841 une émeute éclata à Sainte-Livrade contre le recensement de la matière imposable pour modifier l'assiette de l'impôt. Ce recensement devait fournir les éléments pour modifier l'assiette des impôts fonciers. Ayant eu peur de payer plus d'impôts, les habitants s'en prirent aux personnes chargées du recensement.
La fin du siècle vit la construction du pont sur les piles du Moyen Age.

 

M. Daynès

 

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